Agence de Développement de l'Economie et de l'Environnement de la Province de Hainaut
Interview de Mykola TOTCHYTSKI, Ambassadeur d’Ukraine en Belgique et Représentant auprès de l’Union européenne – 21/12/2020

Publié dans Actualités, Développement des entreprises, Ukraine

La société ukrainienne a depuis longtemps dépassé le point de non-retour sur le chemin de l’Union européenne.

 

L’année qui se termine restera certainement dans les manuels comme l’une des plus difficiles de toute l’histoire récente. La pandémie de coronavirus qui a choqué toute l’humanité et conduit à une crise économique à grande échelle, les événements internationaux violents qui ont conduit au chaos, aux guerres et à l’émergence de millions de personnes défavorisées: un choc mondial, un test pour l’ordre juridique mondial moderne. Cette nouvelle réalité a renforcé une évidence pour l’Ukraine: malgré l’agression extérieure qu’elle subit et les tentatives revanchardes internes la coopération avec l’UE a été et reste la base du futur développement du pays et de la concrétisation des espoirs de ses citoyens en un avenir européen.

 

Mykola Totchytski, Ambassadeur d’Ukraine auprès du Royaume de Belgique et Représentant de l’Ukraine auprès de l’UE, a expliqué à Ukrinform pourquoi le rêve européen de millions d’Ukrainiens est plus fort que la pandémie.

 

LA PANDÉMIE DU CORONAVIRUS A MIS EN EVIDENCE LES MEILLEURS ASPECTS DES RELATIONS ENTRE L’UKRAINE ET L’UE

 

Dmitry Shkurko (D.Sh.) – On peut affirmer sans exagération que 2020 est une année sans précédent non seulement pour l’Ukraine, mais pour toute l’humanité. Si nous parlons des relations bilatérales entre l’Ukraine et l’UE, ont-elles réussi à passer l’épreuve du coronavirus?

 

Mykola Tochytski (M.T.) – Je suis convaincu que les relations entre l’Ukraine et l’UE ont, non seulement réussi l’épreuve du coronavirus, mais sont aussi devenues encore plus fortes, plus dynamiques et encore plus centrées sur les résultats pratiques.

La pandémie a vraiment renforcé nos relations avec l’UE. Sous la pression des circonstances, leurs meilleurs aspects se sont manifestés: la compréhension mutuelle, le respect de l’autre, la volonté de venir à la rescousse et de prêter main-forte pendant les moments difficiles.

 

En fait, chaque Ukrainien peut arriver à cette conclusion sans moi, il suffit de regarder les chiffres, les indicateurs concrets.

 

Il y a quelques jours à peine, le 9 décembre, l’UE a annoncé le transfert d’une assistance macrofinancière d’urgence à l’Ukraine d’un montant de 600 millions d’euros. Je tiens à souligner que nous avons reçu cette aide au taux de 0,125 % par an. Avant cela, en juin, nous avions déjà reçu 500 millions d’euros. Au total, cela représente 1,1 milliard d’euros. Un pareil soutien est très apprécié, surtout en temps de crise.

 

Malgré la pandémie, le dialogue avec l’UE cette année a été particulièrement intense à tous les niveaux. Il suffit de rappeler le succès du 22e sommet UE-Ukraine à Bruxelles, la visite du Haut Représentant de l’UE Josep Borrell en Ukraine, les contacts du Président ukrainien avec les dirigeants de la Commission européenne et du Conseil européen, les 2 visites à Bruxelles à l’échelon du Premier Ministre, et en février, nous attendons la prochaine, dans le cadre du Conseil d’Association.

 

D.Sh.- Dans ce contexte, j’aimerais vous poser une question. Le Conseil d’Association UE-Ukraine auquel vous faites allusion devait avoir lieu le 8 décembre. Il a été reporté à « l’après COVID ». Est-ce que ce type de rencontre est tellement important qu’il ne peut avoir lieu qu’en présentiel ou le coronavirus est-il un prétexte bienvenu pour reporter cette entrevue indéfiniment?

 

M.T.– Il n’y a rien d’anormal à ce report. Il convient de rappeler que le 22e sommet Ukraine-UE du 6 octobre était le premier sommet bilatéral de l’Union européenne avec un pays partenaire depuis le début de la pandémie COVID-19. Il s’est tenu à Bruxelles dans un format traditionnel de présentiel. Cela illustre bien l’attention particulière que l’UE porte à ses relations avec l’Ukraine.

 

Il en va de même pour le Conseil d’Association. Dans le cadre des restrictions actuelles dues à la COVID-19, nous avons convenu avec nos partenaires européens de tenir le Conseil d’Association sous forme d’une réunion en présentiel le 11 février 2021.

 

LA COOPÉRATION AVEC L’UE EST D’UNE IMPORTANCE CRUCIALE DANS LA LUTTE CONTRE LA COVID-19

 

D.Sh.- En Europe, un vaccin contre la COVID-19 est prévu avant la fin de l’année. L’Ukraine peut-elle compter sur l’aide des Européens en matière de vaccination, étant donné que la priorité de  l’UE sera naturellement la vaccination de ses propres ressortissants?

 

M.T.– Depuis le début de la pandémie, les dirigeants de l’UE ont clairement déclaré que ce fléau ne pouvait être surmonté qu’ensemble. Chaque pays ne sera en sécurité que si tout le monde peut fournir une protection contre le virus. L’Ukraine a pris la pleine mesure de cette démarche.

 

Voyez-vous, il y a quelques jours à peine, le Danemark a transmis, à notre demande, 50 respirateurs à l’Ukraine via le mécanisme de protection civile de l’UE. Entre avril et août, nous avons reçu de l’UE des produits médicaux indispensables, pour une valeur de plus de 7 millions d’euros, y compris des respirateurs, des EPI et des tests pour 17 régions d’Ukraine. Cela a considérablement augmenté notre capacité à lutter contre le virus.

 

Je me suis déjà exprimé à ce sujet: l’Ukraine se trouve dans une position unique. La Commission européenne nous a accordé le statut d’observateur au sein du Comité de Sécurité sanitaire et du Système d’Alerte précoce contre les Menaces. C’est un signe important de confiance envers nous.

 

Idem pour les vaccinations. L’Union européenne est un des plus gros donateurs dans le financement du fonds international COVAX (Vaccine Global Access Facility), dont le principal objectif est de rendre le vaccin accessible à tous les pays du monde. L’Ukraine a déjà conclu un accord avec cette institution pour la livraison de 8 millions de doses de vaccin en 2021, et nous le devons, en particulier, à la position active de l’UE.

 

En outre, comme vous le savez, la Commission européenne a déjà signé des contrats prometteurs pour la fourniture de vaccins auprès de six fabricants clés: 600 millions de doses avec une éventuelle commande supplémentaire de même quantité. Si dans les pays de l’UE une partie de ces commandes de vaccins s’avérait excédentaire, elle pourrait être vendue ou simplement transférée à des partenaires comme l’Ukraine. Bien entendu, cela dépendra de nombreux facteurs.

 

L’UKRAINE PROFITE DE L’EXPÉRIENCE DE L’UE POUR LUTTER CONTRE LE CORONAVIRUS

 

D.Sh.- À présent, chaque pays de l’UE élabore son propre plan de vaccination. Dans quelle mesure l’expérience européenne est-elle pertinente pour l’Ukraine? Alors que l’Europe a déjà commencé à sortir du 2e confinement, en Ukraine, on parle encore de l’inutilité de la quarantaine du week-end. Vivonsnous, Européens et Ukrainiens, dans des mondes parallèles?

 M.T.– En fait, il n’existe pas de recette universelle pour résoudre ces problèmes. Même au sein des pays de l’UE. L’expérience de certains est plus pertinente pour nous, tandis que l’expérience d’autres s’avère l’être moins.  En même temps, il ne faut pas oublier que la lutte contre une pandémie est aussi une question d’économie et de stabilité budgétaire. Lors de ses confinements, l’UE a débloqué d’énormes ressources pour soutenir ses producteurs et entrepreneurs. Les capacités budgétaires de l’UE et de l’Ukraine sont très différentes, à tous points de vue; tout comme l’est la structure de l’économie.

 

Nous restons bien entendu attentifs à l’expérience européenne et suivons les conclusions de la Commission européenne.

 

Comme je l’ai déjà mentionné, l’Ukraine participe régulièrement aux réunions du Comité de Sécurité sanitaire. Ces questions y sont discutées chaque semaine: tests, vaccinations, mesures de quarantaine, passage des frontières, etc. Nos représentants travaillent également avec le Centre européen de Prévention et de Contrôle des Maladies (ECDC), qui rédige les recommandations antivirus pour les pays de l’UE. Par conséquent, cette coopération se poursuit.

 

GRACE A SON ACCORD AVEC L’UE, L’UKRAINE AURA L’OPPORTUNITÉ DE RESTAURER LES VOLUMES DE SES ECHANGES COMMERCIAUX AVEC L’EUROPE DÈS 2021

 

D.Sh.- Les statistiques européennes indiquent une légère diminution du volume des importations et des exportations agricoles vers l’Ukraine cette année. Mais le coronavirus est-il la seule cause de ce phénomène? Quelle est la situation dans les autres secteurs?

 

M.T.– En effet, les volumes de nos échanges avec l’UE ont légèrement baissé, mais cela reflète la tendance mondiale dans le contexte de la pandémie. Selon le Service national des Statistiques, le volume des échanges commerciaux entre l’Ukraine et l’UE a diminué de 13,5 % sur les 9 premiers mois de cette année. Mais il faut rappeler que depuis 2016, date à laquelle l’accord complet de libre-échange a été mis en place, et jusqu’au début de la crise actuelle, le commerce entre nos pays a augmenté régulièrement. Nous estimons que cette tendance va se poursuivre dès l’an prochain.

 

D’une manière générale et ce, malgré la pandémie, la coopération commerciale et économique entre l’Ukraine et l’UE a été positive cette année. Par exemple, après l’épidémie de grippe aviaire début 2020, nous avons réussi à localiser rapidement le problème et à reprendre les exportations de poulets vers l’UE.

 

Il est très important de souligner, même si on en parle peu, que l’UE a reconnu cette année l’équivalence du système de certification des semences de céréales ukrainiennes. Cela semble un peu austère dit comme cela, mais cette décision donne aux producteurs ukrainiens la possibilité d’exporter des céréales vers le marché européen.

 

Donc, la baisse du volume des exportations agricoles de l’Ukraine vers l’UE était uniquement due à la crise du coronavirus, nous ne voyons pas d’autres raisons à cela. En même temps, l’Ukraine reste l’un des vingt plus importants partenaires de l’Europe en termes d’importations et d’exportations agricoles. Nous sommes le 4e pays dans le classement des exportations agricoles vers l’UE avec plus de 3 milliards d’euros, derrière le Royaume-Uni, le Brésil et les Etats-Unis; et le 14e pays importateur de produits agricoles européens pour un montant de plus de 1,5 milliard d’euros. C’est une réalisation importante.

 

L’UKRAINE EST OUVERTE A LA DISCUSSION CONCERNANT TOUS LES PROBLÈMES LIÉS AU COMMERCE AVEC L’UE

 

D.Sh.- Selon le récent rapport de l’UE sur la mise en œuvre de l’Accord d’Association par l’Ukraine, les évaluations des réformes sont positives. Mais il y a été également mentionné des tentatives d’utilisation du protectionnisme et de la politique pour résoudre les problèmes économiques liés à la pandémie, ce qui est incompatible avec l’Accord d’Association. Quelles actions menées par l’Ukraine ont-elles provoqué une telle évaluation par l’UE?

 

M.T.– Le protectionnisme est avant tout mentionné dans le contexte du projet de loi sur les exigences de localisation des marchés publics. L’UE a mis en garde contre cela à plusieurs reprises.

 

Ce projet de loi est actuellement en préparation pour la deuxième lecture. Le gouvernement cherche à trouver un mécanisme qui soutiendra la production nationale sans pour autant violer nos obligations internationales.

 

Certaines remarques étaient liées à une enquête et l’introduction de mesures de protectionnisme. Ces questions sont bien connues, elles font d’ailleurs l’objet d’un dialogue actif y compris au niveau des spécialistes. Nous cherchons et trouverons la bonne solution à ces freins au commerce.

 

LA TRANSFORMATION «VERTE» OUVRE LA VOIE À UN DÉVELOPPEMENT INNOVANT ET COMPÉTITIF POUR L’UKRAINE

 

D.Sh.- Encore au début de l’année, l’UE et l’Ukraine semblaient plutôt optimistes quant à la participation du pays au Pacte vert pour l’Europe. Pour le moment, du côté européen, en particulier dans le rapport déjà mentionné plus haut, on critique plutôt le rythme de développement des énergies vertes, le soutien budgétaire aux programmes d’efficacité énergétique et la législation environnementale. Quel est le souci?

 

M.T.– Le Pacte vert pour l’Europe a été présenté en décembre 2019 et l’Ukraine a immédiatement annoncé son intérêt d’y prendre part. Déjà en janvier 2020, notre gouvernement a créé un groupe de travail interministériel sur les questions climatiques, présidé par le Premier Ministre, et dont le but est de coordonner les grandes lignes de cette politique et de la coopération avec l’UE. Cette question sera à l’ordre du jour du prochain Conseil de l’Association.

 

L’Ukraine apporte déjà sa contribution à la future neutralité climatique de l’Europe – il existe d’ailleurs différentes façons d’y contribuer dont l’Accord de Paris. Ces obligations «vertes» sont également stipulées dans notre Accord d’Association avec l’UE.

 

Il faut souligner que l’objectif de l’UE d’atteindre la neutralité climatique d’ici 2050 signifie une transformation innovante du secteur européen des énergies et de tous les secteurs de l’économie. Il est clair que ces processus affecteront également nos relations bilatérales et le développement technologique de l’Ukraine.

 

Quant à la critique… Il serait mal venu de ma part de commenter la critique faite au gouvernement concernant le soutien budgétaire aux programmes d’efficacité énergétique. Je ne peux que vous rappeler que, selon le gouvernement même, il y a actuellement suffisamment de liquidités dans le Fonds d’Efficacité énergétique.

 

D.Sh.- Mais la question, évidemment, ne porte pas seulement sur les fonds, mais aussi sur la structure générale de la consommation énergétique en Ukraine. Est-il réaliste pour nous, en toute bonne foi, de nous débarrasser de notre dépendance aux ressources fossiles?

 

M.T.– Comme je l’ai dit, chaque pays, chaque économie a ses propres particularités, et l’économie ukrainienne n’échappe pas à la règle.

 

Il ne faut pas oublier que l’une des questions clés pour l’Ukraine est la nécessité de réformes dans le secteur du charbon. Et la transformation de nos régions charbonnières en territoires attractifs pour les investissements nécessitera un soutien financier solide.

 

Il est vrai que la consommation énergétique et les émissions carbone du PNB de l’Ukraine restent assez élevées par rapport, non seulement aux pays européens, mais aussi à nos voisins d’Europe de l’Est. Mais nous continuons d’adapter la politique énergétique de l’Ukraine aux objectifs de “décarbonisation”. La clé du problème se situe dans la politique d’efficacité énergétique et l’utilisation rationnelle des ressources.

 

Nous savons, et nos partenaires européens le reconnaissent, que l’Ukraine possède un potentiel important dans la production d’énergie propre. Dans la stratégie de l’UE sur l’hydrogène, l’Ukraine est définie comme l’un des principaux partenaires de la production d’hydrogène « vert ». Par conséquent, nous avons toutes les chances de devenir un acteur actif dans l’objectif stratégique de neutralité climatique de l’UE d’ici 2050, y compris dans la réalisation des objectifs climatiques 2030.

 

L’UKRAINE CHERCHE A OCCUPER UNE PLACE DANS LA PRODUCTION EUROPÉENNE

 

D.Sh.- On sait que l’Union européenne aimerait développer une coopération avec l’Ukraine dans le domaine de l’industrie extractive et utiliser plus largement les matières premières ukrainiennes. Mais l’Ukraine elle-même a-t-elle une vision stratégique de l’utilisation de ses propres ressources, qu’il s’agisse du lithium, des composants des terres rares ou du bois? Comment cela se reflète-t-il pratiquement dans la coopération avec l’UE?

 

M.T.– Je voudrais vous rappeler que c’est à notre initiative, en 2017, que la Commission européenne a accordé à l’Ukraine le statut d’observateur au sein du Groupe CE sur l’Approvisionnement en Matières premières. Une telle coopération, en particulier, nous ouvre des voies pour développer le secteur extractif, accéder aux opportunités et aux sources de financement de l’UE.

 

Dans ce dialogue avec l’UE, nous parlons surtout de la création de valeur ajoutée et d’emplois supplémentaires. C’est particulièrement important, comme je l’ai déjà dit, pour la transformation des régions charbonnières et pour le traitement des déchets de l’industrie minière. Notre approche est pleinement cohérente avec les principes et les ambitions du Pacte vert pour l’Europe.

 

L’UE et l’Ukraine en ont parlé lors du sommet de Bruxelles en octobre. Hier et aujourd’hui, notre objectif reste inchangé: attirer l’aide européenne pour l’innovation en Ukraine. C’est une condition sine qua non à l’attraction d’investissements européens dans la production industrielle, pour que l’Ukraine devienne un maillon de ce réseau de création de valeur ajoutée. En d’autres termes, notre objectif est une production industrielle commune avec l’UE.

 

L’UE EST PRÊTE À AIDER L’UKRAINE A SORTIR DE LA CRISE CONSTITUTIONNELLE

 

D.Sh.- Ces derniers mois, de vives discussions ont eu lieu autour de la décision très médiatisée de la Cour constitutionnelle concernant les déclarations électroniques. L’UE a toujours fourni une assistance à l’Ukraine dans la réforme de son système juridique, y compris dans la réforme judiciaire et la réforme juridique au sens large. Cela signifie-t-il que les méthodes juridiques européennes ne fonctionnent pas en Ukraine?

 

M.T.– Cette focalisation de l’UE sur l’Etat de droit est vitale et nécessaire pour l’Ukraine, ainsi que des avancées dans la réforme anti-corruption. C’est précisément une condition préalable à la création d’un climat favorable aux affaires et aux investissements.

 

L’UE a salué les avancées de l’Ukraine dans ce domaine, et plus précisément la création de la Cour suprême de lutte contre la corruption. Tous ces signes ont été épinglés dans le troisième rapport de l’UE concernant l’évaluation de la mise en place par l’Ukraine des obligations liées à la libéralisation des visas; rapport qui a été publié cet été et a reçu une évaluation positive par l’UE, aussi bien pour le respect de ces obligations que pour la lutte anti-corruption.

 

Bien entendu, la décision de la Cour constitutionnelle du 27 octobre 2020 n’est pas passée inaperçue auprès de nos partenaires européens qui ont souligné qu’elle aurait de lourdes conséquences pour l’ensemble de l’infrastructure anti-corruption en Ukraine. En même temps, les partenaires européens reconnaissent la difficulté de la situation et sont également prêts à aider l’Ukraine à trouver une solution.

 

DANS L’AFFAIRE DE LA PRIVATBANK, LA LEGITIMITE ET LA PRIMAUTE DU DROIT DOIVENT TRIOMPHER

 

D.Sh.- Les partenaires européens continuent de souligner à différents niveaux la nécessité de traduire en justice les responsables de la fraude qui a éclaboussé la Privatbank. C’est même déjà devenu une sorte de mantra. Pourquoi cette question est-elle fondamentale pour nos partenaires européens?

 

M.T.– Ce sont plutôt les organismes ukrainiens chargés de faire appliquer la loi qui devraient commenter cette affaire, et non les diplomates.

Cette question est importante pour l’UE dans un contexte d’octroi de divers types d’aides, afin d’être assurée que ces aides seront utilisées à bon escient et efficacement à l’avenir. Je suis convaincu que dans cette situation, la légitimité et la primauté du droit doivent prévaloir. Nous n’avons pas d’autre moyen.

 

LA SOCIETE UKRAINIENNE A DEPASSE LE POINT DE NON-RETOUR SUR SON CHEMIN VERS L’UE. CE POINT, C’ÉTAIT LA RÉVOLUTION DE LA DIGNITÉ. (Ndt: révolte populaire de février 2014 ou Révolte de Maïdan)

 

D.Sh.- Le prochain sommet du Partenariat oriental doit avoir lieu ce printemps. Les ambitions de l’Ukraine d’acquérir le statut d’adhérent à l’UE sont bien connues. Mais est-ce un objectif réalisable aujourd’hui, à l’heure du Brexit et des contradictions politiques au sein de l’Union européenne? L’Ukraine a-t-elle franchi le point de non-retour sur son chemin vers l’UE, malgré l’activisme flagrant des forces de revanche (Ndt: forces pro-Russes) dans le pays?

 

M.T.– Premièrement, je ne doute pas que la société ukrainienne a dépassé le point de non-retour sur son chemin vers l’UE. Ce point était la Révolution de la Dignité.

En effet, l’UE mène des négociations difficiles avec le Royaume-Uni concernant leurs relations futures. La situation budgétaire de l’UE et une tentative de veto de la Pologne et de la Hongrie ont également aggravé un autre problème douloureux de l’union: la migration et l’état de droit. La décision de l’UE d’entamer des négociations avec les pays des Balkans occidentaux sur l’adhésion a pris du temps, en particulier en raison des progrès insuffisants dans le domaine de la justice et de la sécurité dans ces pays.

 

C’est pourquoi, le processus décisionnel au sein de l’UE est très compliqué et la recherche de compromis nécessite un certain temps et des efforts.

 

Mais nous devons en tirer des conclusions. En prenant en considération l’état d’esprit politique au sein de l’UE, nous devons persévérer dans nos propres «devoirs à domicile», condition nécessaire à la croissance sociale et économique.

 

Le Partenariat oriental contribue à ces réformes, y compris en Ukraine. Nous utilisons cet outil ainsi que l’Accord d’Association pour synchroniser nos politiques et notre législation avec celles de l’UE et répondre in fine aux critères de Copenhague pour l’adhésion à l’UE.

L’Ukraine, la Géorgie et la Moldavie, aujourd’hui partenaires associés de l’Union européenne, ont déjà certaines approches communes pour mettre en œuvre leur propre voie vers l’intégration européenne.

 

Dans le même temps, l’initiative du « Partenariat oriental » subit aujourd’hui des tests sévères.

La stabilité de l’ensemble du continent européen dépend directement de l’évolution de la situation dans la région.

 

L’ADHÉSION DE L’UKRAINE À L’UE NE SERA PAS UN MIRACLE, MAIS BIEN LE RÉSULTAT DES EFFORTS DES UKRAINIENS

 

D.Sh.- Quel miracle doit se produire en 2021 pour que l’Ukraine rejoigne l’UE, au moins dans un délais de 10 ans?

 

M.T.– Je suis convaincu que l’avenir de l’Ukraine est dans l’UE, et nous deviendrons certainement membre à part entière de l’Union européenne. Mais ce n’est pas une question de miracle ou de délais. Tout dépend de notre volonté de construire des institutions inclusives et efficaces, de former l’Europe, avant tout dans la conscience de nos citoyens.

Nous devons achever la réforme judiciaire, empêcher la répétition de conflit avec la Cour constitutionnelle. Sans une réforme judiciaire bien ficelée, il sera difficile de concrétiser tous les travaux positifs de ces dernières années.

 

Donc, tout dépend de notre travail quotidien pour réformer l’État, introduire des normes européennes, créer des success-stories pour l’Ukraine et les Ukrainiens. C’est un gage de succès dans nos relations avec l’UE.

 

par Dmitry Shkurko, UKRINFORM, Bruxelles

Traduction et adaptation: Svetlana Ossinnia et Caroline Dorignaux, Hainaut Développement

 

 

Source: https://www.ukrinform.ru/rubric-polytics/3157757-nikolaj-tocickij-predstavitel-ukrainy-pri-es.html

 

Aller au contenu principal